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Homélie Dimanche du Lépreux

P. Joseph G. EID

Évangile du jour

Mc 1, 35-45

Chers frères et sœurs, les textes de ce Dimanche nous dressent un des axes les plus importants qui devraient orienter notre carême : l’obéissance à la volonté de Dieu.

Dans la lecture de la lettre aux Romains, St Paul avertit ses disciples : Il ne faut donc pas que le péché règne dans votre corps mortel… le salaire du péché, c’est la mort, dit-il. Dans cette perspective, la pire des maladies c’est de laisser le péché régner sur nous. Le remède présenté par Paul c’est d’obéir de tout cœur au modèle présenté par l’enseignement transmis, autrement dit, à la volonté de Dieu.

Dans l’évangile d’aujourd’hui il est question du Lépreux. Nous avons des traces de la lèpre dans des manuscrits laissés par différentes civilisations. La lèpre faisait peur et était considérée comme une malédiction des dieux, une punition de Dieu dans l’Ancien testament. Ce n’est qu’au 20ème siècle que cette maladie a pu être diagnostiquée et traitée de manière appropriée.

Le lépreux de notre évangile était donc désespéré. Les traitements de son temps ne pouvaient pas le guérir. Isolé de la société et rejeté, il ne pouvait s’approcher et toucher que ses semblables, de qui il recevait ou non, un peu d’affection. Il vint vers Jésus, se mit à genoux et lui dit : Si tu le veux, tu peux me purifier. Il savait que seul jésus pouvait sauver/guérir son corps. Tout ce qu’il fallait c’est que Jésus le veuille. En ce, le lépreux nous livre un exemple. Quelque soit la gravité de notre situation, ayons confiance en Dieu, approchons-nous de lui avec humilité. Nous pouvons être sûrs que notre espérance est toujours bien placée. Dieu écoute nos supplications. Il répond à sa manière à celui qui s’approche de Lui. Et sa réponse dépasse toujours nos attentes humaines.

Le lépreux est donc guéri grâce à cet acte de foi en la miséricorde du Seigneur. Cependant, c’est ce qui se passe après qui est intriguant. Jésus l’avertit rigoureusement : Attention, ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre, et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi : cela sera pour les gens un témoignage. Notre Seigneur interdit au Lépreux de ne rien dire, mais plutôt d’accomplir ce qui était prescrit par la Loi. Il lui révèle sa volonté. Jésus ne voulait pas que sa mission, que son annonce du royaume soit éclipsée par les bienfaits d’une guérison physique. Nous pouvons et nous devons prier pour nos besoins. Dieu nous le demande. Mais Jésus nous rappelle ce que devrait être, même au cœur de nos souffrances, notre vrai objectif, notre vrai bien : Rendre témoignage selon sa volonté prescrite dans la Loi (pour le juif). Dans nos prières quotidiennes, demandons plutôt : Quelle est ta volonté pour moi aujourd’hui ? Eclaire ma conscience Seigneur pour que j’agisse vraiment selon ta volonté révélée en Eglise. Je me confie à toi en tout, à tes enseignements.

Le comportement du Lépreux nous révèle donc l’importance de l’obéissance à la volonté de Dieu. En contrant la volonté de Jésus, cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. De partout cependant on venait à lui.

Les gens ont continué de venir vers lui malgré l’obstruction causée par la désobéissance du Lépreux. Dieu nous donne de participer activement à son projet de salut. Il peut réaliser ce projet sans nous. Mais malheureusement nous pouvons retarder son projet, même si éventuellement Dieu finit par arranger les choses.

Chers amis, face à nos difficultés et à nos souffrances physiques psychologiques ou spirituelles, nous faisons quelquefois la même démarche que le lépreux. Nous nous approchons de Jésus le sollicitant de nous venir en aide. Mettons-nous à l’école de l’humilité. Convertissons-nous. Adoptons le regard de Dieu. En ce carême, essayons plutôt de cultiver notre désir de Dieu Lui-même, de sa volonté. Cherchons à lui offrir des petits actes qui témoignent de notre amour.

A Lui la gloire à jamais.

Premier Vendredi du Carême 2019

Pourquoi la Croix ? La Croix est, aujourd’hui le même scandale, la même folie. Ce scandale nous mène à nous interroger sur notre espérance. L’espérance que nous possédons, nous devons pouvoir en parler et en rendre compte, avec des mots jaillis de l’intérieur, comme nous l’indique St Pierre dans sa première lettre. Rendre compte de notre espérance c’est donc la mission que nous lègue Jésus à travers son Eglise. Car la Croix que nous portons sur nous, la Croix que nous traçons sur nous fréquemment dans la journée, cette Croix nous enseigne.

La croix est nécessaire : La Croix est là, imbibée de souffrance et d’anxiété. Inutile de penser que Jésus aurait pu mourir autrement, plus tard ou ne pas mourir du tout et rester avec nous. Non, Jésus le dit à plusieurs reprises à ses disciples : « Il fallait que le Fils de l’homme monte à Jérusalem » … Cet « il fallait que » a un sens. Par sa passion Jésus nous révèle le plan d’amour de Dieu. Cet « il fallait que » n’est pas une fatalité, une prédestination (Maktoub). Et comme saint Pierre, nous avons envie de dire : « Nous ne permettrons pas que cela arrive. » Saint Pierre, lui était prêt à lutter et sortit son glaive.

La Croix comme instrument de salut : Dans ce drame de la mort du Christ, il semble que ce soit le mal qui triomphe. Pourtant non, il n’y a pas de fatalité. Lorsque le mal semble l’emporter, lorsque Jésus rend son âme et que tous les disciples se dispersent comme un troupeau privé de pasteur, Jésus demeure le Vivant. Il traverse les ténèbres et prive le royaume de la mort de sa puissance.  Face à tout découragement, à toute désespérance humaine, il faut opposer cette certitude, ce roc absolu de la Croix du Christ, car c’est une Croix qui ne représente pas la mort, le néant ou l’absurde, mais qui symbolise un amour infini auquel nous sommes invités à communier. En cela réside cette espérance dont nous devons rendre compte.

Sans Croix, pas d’amour : Il y a plus encore. « Quand j’aurai été élevé de terre, dit Jésus, j’attirerai tous les hommes à moi » Les bras étendus du Christ ne manifestent pas tant la souffrance humaine que l’amour de Dieu qui s’offre, qui se donne constamment, qui sort de lui-même et va jusqu’au plus bas, jusqu’au plus profond de notre misère pour nous attirer à Lui, nous élever à Lui et nous unir à Lui. Il y a ainsi rencontre entre la Croix-amour de Dieu et la Croix-réponse et amour de l’homme. C’est pour cela que l’homme a été créé, pour vivre de l’amour éternel, pour atteindre et communier pour toujours, indiciblement, à la vie divine.

Aujourd’hui, nous sommes les instruments, les échos de la Croix du Christ. Si nous sommes ainsi en marche, le regard levé vers la Croix du Christ, Dieu nous révèle à chacun et à tous ensemble notre chemin, qui est un chemin de vie, de témoignage et d’espérance, un chemin d’Église.

Dimanche des Défunts

Lazare et l’homme riche

P. Joseph G. EID

Évangile du jour

Luc 16 : 19-31

Chers frères et sœurs, aujourd’hui nous prions pour et avec nos défunts qui nous ont précédé dans la demeure céleste, tous les êtres qui nous sont chers, qui ont marqué notre vie et qui nous manquent énormément. Tôt ou tard, nous aussi nous traverserons jusqu’à l’autre rive.

Mais, entre-temps, gardons allumée notre foi, cette belle foi qui alimente notre espérance afin de continuer le chemin et de mener le bon combat, jusqu’au jour où nous nous retrouverons avec les autres et avec le Bon Dieu. Un des combats humains contemporains les plus virulents, qui est le combat contre l’injustice, l’oppression, la discrimination. C’est une des causes les plus louables.

Une des interprétations de cette parabole peut se comprendre comme un appel à l’engagement social, à combattre les injustices, surtout comme un appel au renoncement à la cupidité, un appel à traiter les pauvres avec justice et miséricorde. Pourtant, rien dans l’évangile ne suggère que Lazare était victime d’oppression ou de discrimination. Il est sous-entendu qu’il y a un mal beaucoup plus important que d’autres maux. Bien que le texte ne dise pas explicitement que l’homme riche était injuste vis-à-vis de Lazare, bien qu’il ne l’ait pas opprimé, nous pouvons cependant supposer que son indifférence/la non-existence des liens avec l’autre est en soi une forme d’injustice, voire la pire des injustices. Bien plus, elle semblerait en être la racine.

Lazare est simplement identifié comme pauvre : Le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra. Au séjour des morts, il était en proie à la torture. Dans cette perspective, la justice divine a compensé en quelque sorte le manque de justice terrestre.

Saint Jérôme commente ce passage en disant que l’homme riche n’était accusé ni de cupidité, ni de vol, ni d’adultère ni en réalité d’aucun acte répréhensible. L’orgueil est le seul mal dont il est coupable. L’orgueil qui coupe nos liens avec les autres, au point de devenir indifférent et de ne plus les remarquer. Nous ne cherchons rien d’autre que nos besoins personnels. Nous nous soucions surtout des nôtres, et pas toujours de ce qui est le mieux pour eux. Cependant, l’autre qui est juste devant mon portail, je ne le remarque pas. Demandons-nous chacun aujourd’hui : qui se trouve devant mon portail ? ce n’est peut-être pas un inconnu qui attend juste un contact. Quels sont ses besoins ?

Les besoins de l’autre n’ont pas forcément à être d’ordre matériel. Nous pouvons-nous dire : pourquoi me soucier des autres, surtout de ces inconnus qui se fichent carrément de moi. En quoi me concernent-ils ? En fin de compte, je ne fais de mal à personne. Je ne dérange personne et tout ce que je désire c’est de ne pas être dérangé par qui que ce soit. Nous voyons le monde à travers l’optique « qu’est-ce que cela a avoir avec moi ?». Individualisme pur et simple, ou peut-être simple ignorance : Pardonne-leur car ils ne savent pas

Mais le Seigneur, à travers cette parabole, tente d’attirer notre attention sur le fait que nous sommes les gardiens de notre frère (Caïn où est ton frère ?). Oui, nous devrions être aussi préoccupés par les besoins de ceux qui nous entourent que par les nôtres. Nous devons chercher ce qui est bon pour eux, ce qui les nourrit vraiment, ce qui les aide à grandir. La parabole met clairement en garde : la miséricorde de Dieu envers nous est liée à notre miséricorde envers notre prochain.

Autre point que j’aimerai souligner : dans son audience générale du 16 mai 2016, le pape François commente éloquemment ce texte en disant : Lazare, qui gît devant la porte, est un rappel vivant fait au riche pour qu’il se souvienne de Dieu, mais le riche n’accueille pas ce rappel.

Chers frères et sœurs, cet autre qui gît devant ma porte, c’est mon frère, ma sœur. L’autre à ma porte est la porte de mon salut. Il/Elle est le Christ-pauvre qui se dresse mendiant devant moi, en quête ne serait-ce que de mon attention. Sa pauvreté est ma vraie richesse, et nous pouvons nous enrichir mutuellement.

Cette semaine, nous pourrions peut-être faire un effort pour remarquer ceux qui nous entourent, un peu plus que d’habitude, en particulier les personnes les plus proches avec lesquelles nous vivons et travaillons tous les jours. Elles sont souvent les plus faciles à oublier quand elles souffrent, car elles nous sont si familières. Communiquez avec les personnes que vous aimez. Quelquefois nous pensons que cela va de soi, que nous le faisons si bien, que l’autre me comprend. Des choses comme les suicides et le divorce peuvent parfois être empêchées en discutant davantage et en participant à la vie de chacun. Les adolescents et les jeunes sont également particulièrement exposés à la souffrance et les adultes de leur vie peuvent même ne pas s’en rendre compte. Essayons de mieux les regarder.

Contemplez leurs visages. Rappelez-vous surtout qu’à travers le visage de l’autre, resplendit la gloire de Dieu !

Homélie Fête de St Maroun

Père Joseph G. EID

Chers frères et sœurs, aujourd’hui nous célébrons la St Maroun, fête du patron de l’église maronite.

Maroun, dont le prénom peut signifier le petit Seigneur, est un moine chrétien syriaque, anachorète, ayant vécu à la fin de l’IVe et au début du Ve siècle et qui s’est retiré du monde. Selon Théodoret de Cyr, Maroun menait, en plein air, à l’écart, au sommet d’une montagne, près d’un ancien temple païen qu’il avait converti en église, une vie de prières et d’ascèse. Il s’exposait volontairement à l’ardeur du soleil et à toutes les intempéries en s’abritant dans une tente en peau. L’austérité de sa vie et les miracles qu’il accomplissait le rendirent célèbre dans toute la Syrie, et beaucoup venaient à lui pour solliciter sa prière. Après sa mort, un monastère s’élèvera sur son tombeau et « Mar Maroun » deviendra un grand lieu de pèlerinage. Ce monastère sera la capitale religieuse de ceux qui furent appelés « ceux de Maroun » ou Beit Maroun (la maison de Maroun) ou maronites.

« Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle ».

Chers frères et sœurs, la vocation de Maroun répond à une prise de conscience. Très vite, le cœur de Maroun fut percé par l’amour de Dieu. Il réalise que tout ce que Dieu crée est bon, mais que l’attachement aux choses créées, au point d’en faire des idoles, peut mener l’être humain à sa perte. Dans un contexte social similaire au nôtre (peut-être sans les avancées technologiques), Maroun, comme d’autres poussés par un élan de charité, préfère suivre la voie du détachement radical pour gagner la vie éternelle. Il est conscient qu’il est ce grain de blé semé appelé à mourir pour porter des fruits. Maroun préfère se retirer à l’écart, loin du luxe apparent de son époque. Son mode de vie est vite reconnu comme un remède au vide engendré par la quête des plaisirs éphémères, dans un monde qui ne reconnait plus que notre vie ici-bas n’est que passage. Maroun, comme beaucoup, est en quête d’une plénitude qu’aucune société ne peut offrir. Sa vie de détachement, sa vie à l’écart, n’est pas une fuite, mais bien au contraire un courageux face à face qui ressemble au retrait de Jésus dans le désert.

Dans ce désert, Maroun se met à l’écoute du Seigneur qu’il aime. Il défie le tentateur en se remettant entre les mains de Dieu. Il suit l’enseignement des apôtres, comme Timothée, dansla foi, la patience, la charité et la persévérance. Il devint un modèle de sainteté pour d’autres. Chers frères et sœurs, en tant que paroisse maronite regroupant des fidèles de différentes confessions, essayons tous de vivre les valeurs que nous a laissé Maroun. Il s’agit des valeurs mêmes de l’évangile.

Comme Maroun, ayons cette prise de conscience que Dieu seul suffit. Attachons-nous à la vérité et défendons là comme l’a fait Maroun, en toute humilité et douceur, mais sans compromis. Peut-être pourrions-nous également être un point d’interrogation en rappelant aux disciples du Christ, partout dans le monde et tout particulièrement en orient, ce qui est le plus important : ne pas chercher la gloire du monde, mais celle de Dieu !

Homélie du troisième Dimanche après l’Epiphanie

P. Joseph G. EID

Textes du Jour

Ep 3, 23-29 et Jn 3, 1-16

Aujourd’hui, essayons de nous placer au cœur de cette scène de l’évangile. Imaginons-nous témoins de cette rencontre entre Jésus et Nicodème. Il fait nuit. Et Nicodème vient discrètement rendre visite à Jésus. Rappelons-nous qui était ce Nicodème ; et qui était Jésus dans ce contexte. Il vrai qu’en dépit de son passé humble et inaperçu, Jésus était rapidement devenu un prophète et un enseignant exceptionnel en Israël (un vrai succès dirait-on).
 
Je me demande quelle serait néanmoins notre réaction si quelque chose de similaire se passait avec nous, personnellement ?
Nous pourrions, par exemple, imaginer un homme dans sa trentaine, n’ayant ni master, ni doctorat en religion, apparaissant soudainement en public, se forgeant rapidement une réputation de guérisseur, de prophète. Les gens vont jusqu’à le proclamer roi d’Israël et messie, totalement dominant par son autorité personnelle, son expérience évidente. Reconnaissons humblement combien il serait difficile que cette personne soit validée par les théologiens ou par le pape. Presque une impossibilité.
Pensez à la plupart des autorités qui voient un tel phénomène émerger, aux avis divergents, tellement partagés à son sujet. Surtout quand ce nouveau phénomène en question n’a pas les qualifications requises. Puis imaginez la peur des érudits, des hommes et des femmes qui ont un certain statut social, qui accepteraient sa légitimité spirituelle, qui s’approcheraient de ce nouveau maître, humblement, pour accueillir/recevoir son enseignement/sa lumière. Scénario fort improbable.
 
Oui, je le sais. Mais tel était Nicodème. Il vint vers Jésus la nuit, pour converser. Nicodème, grand maître d’Israël, cherche à écouter Jésus, à comprendre. Il le reconnaît comme rabbin, comme quelqu’un qui vient de la part de Dieu, un maître qui enseigne. Il reconnaît que personne ne pourrait accomplir les signes que Jésus accomplissait, si Dieu n’était pas avec lui.
 
En fin de compte, ce que Nicodème désire vraiment, au fond de lui, c’est de voir le royaume : « Amen, amen, je te le dis : à moins de naître d’en haut, on ne peut voir le royaume de Dieu ». Jésus perce son âme. Il y décèle son vrai désir, la raison pour laquelle il vient le rencontrer. Nicodème est un rêveur qui rêve du royaume et qui veut le voir. C’est un homme assoiffé de justice et assoiffé de Dieu. Comme la samaritaine au bord du puits, il cherche à se désaltérer. Il vient à la source. Il avait devant lui le fils de dieu fait homme. Le messie promis. Bien plus, dans ce cadre ordinaire et simple, le créateur de l’univers était assis, ou debout, devant lui. Comme à la Genèse de l’univers, Jésus-Créateur essaie de lui expliquer qu’à lui seul le désir n’est pas suffisant. Il faut accueillir le témoignage. Il faut se laisser créer par Dieu dans l’eau et l’esprit, allusion au baptême qui fait de nous de nouvelles créations, filles et fils du royaume. Jésus parle au pluriel, comme s’il se référait non seulement à lui-même, mais également à ses compagnons de mission : Amen, amen, je te le dis : nous parlons de ce que nous savons, nous témoignons de ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage.
 
Chers frères et sœurs, en tant que chef du corps de ses disciples qui est l’église, Jésus demeure dans son église. L’enseignement de Jésus devient celui de ses disciples qui enseignent en son nom. Et, à travers le ministère dans l’enseignement, Jésus Lui-même se trouve avec son église. L’église, c’est la communauté des filles et fils du Royaume, de ceux qui voient vraiment Dieu agir dans le monde, de ceux qui goûtent déjà au Royaume.
 
Aujourd’hui, avec vous, je prie pour que se reflète sur nos visages la lumière de celles et ceux qui sont nés de l’eau et de l’esprit, des baptisés qui ont vraiment vu le royaume et qui agissent en fonction de leur vocation de disciples pour la plus grande gloire de Dieu.

Homélie du Nouvel An

P. Joseph G. EID

Évangile du jour

Lc 2 : 21

Chers frères et sœurs, il est de coutume de formuler les vœux au début de chaque nouvelle année. Je suis énormément reconnaissant vis-à-vis de ceux qui m’ont exprimé, chacun à sa manière, les beaux vœux chargés d’émotions sincères et des meilleurs des souhaits et des intentions pour 2019. Permettez-moi à mon tour de m’exprimer :

Chers amis, je vous souhaite une année 2019 riche en expériences humaines à tous les niveaux. Je vous souhaite non pas tout le bonheur du monde, mais déjà d’être contents et satisfaits, heureux de qui vous êtes, de votre personne, fille ou fils bien-aimé(e) de Notre Seigneur. Je vous souhaite une année 2019, non pas libérée de tous les soucis et de toute tristesse, mais une année au cours de laquelle augmentera en vous cette admirable capacité à vous soucier des autres et qui se manifestera davantage pour que d’autres puissent l’acquérir. Et que votre tristesse face à l’injustice et au désordre social, ou d’autres problèmes sociaux, humains et autres, soit également un rayon d’espérance pour les autres, qu’il y ait toujours espoir en l’humanité, et qu’il y ait toujours une bonne nouvelle à annoncer.

Pour ne pas trop tarder, je ferai une petite réflexion sur les textes d’aujourd’hui, surtout sur ce court évangile de ce jour, centré sur la circoncision de Jésus. Selon la loi de Moïse, loi donnée par le Seigneur lui-même à Abraham, chaque mâle du peuple élu de Dieu, devait être circoncis. La circoncision a lieu le huitième jour après la naissance. Un signe qui concrétisait son appartenance à ce peuple et qui le marquait pour la vie, le distinguant des autres hommes. Cette circoncision corporelle préfigurait la nouvelle circoncision du Nouveau Testament, non plus corporelle, mais spirituelle, celle du cœur. Quelle forme prend cette circoncision spirituelle ? Le disciple du Christ ne peut le suivre sans porter sa croix, sans une forme de don de soi. Concrètement, nous devons fuir le péché qui nuit à notre personne, mais nous devons également œuvrer pour le salut des autres, en donnant une partie de nous-mêmes. Le chrétien se distingue par cette circoncision spirituelle. C’est par elle qu’il réalise et accomplit, par la grâce sanctifiante, les promesses de son baptême.

Chers frères et sœurs, c’est en agissant selon la grâce que nous pouvons œuvrer pour le royaume, pour que se réalise sur terre, en partie, ce que nous allons vivre pleinement au Royaume. Ce n’est pas pour rien que, à l’initiative de l’église catholique, cette journée est également la journée mondiale pour la paix. Que cette nouvelle année 2019 soit, pour chacun, une année de paix et de joie profonde, extérieure et intérieure.

Que ce nouvel an, qui commence par la journée de la paix, nous rappelle qu’il n’y a pas de paix possible sans effort, sans don, sans délaisser une part de notre égoïsme, et sans ouvrir notre cœur à la grâce, pour que cette paix et ce bonheur, qui ne peuvent être réalisés et concrétisés que si nous agissons la main dans la main avec Notre Dieu, nous accompagnent tout au long de l’année et de notre vie. A Notre Seigneur la gloire pour les siècles des siècles.

Homélie de la fête de l’Epiphanie

P. Joseph G. EID

Évangile du jour

Lc 3 : 15-22

L’Épiphanie, frères et sœurs en Christ, est un moment de révélation, un moment dans lequel nous réalisons quelque chose d’important à propos de Dieu et de nous-mêmes. L’épiphanie révèle que Jésus est le Sauveur de son peuple, mais également de tous les êtres humains qui ont vécu ou vivront. Jésus est aussi ton Sauveur et le mien. Et quand nous sommes sauvés, il nous arrive quelque chose : nous abandonnons notre propre agenda et commençons à vivre pour le salut des autres. Nous ne vivons plus pour nous seuls mais pour lui qui est mort et ressuscité pour nous, envoyant le Saint-Esprit de son Père comme premier cadeau à tous ceux qui croient en lui : Le Saint-Esprit à travers lequel nous ne vivons plus pour nous-mêmes mais pour lui, le Saint-Esprit, la plénitude de la grâce dans nos cœurs nous permettant d’achever l’œuvre de Jésus dans notre monde.

Aujourd’hui c’est l’Epiphanie, le baptême du Seigneur. Et aujourd’hui, chacun de nous se voit rappeler sa propre renaissance par l’eau et l’Esprit. Les quatre évangiles, chacun à sa manière, mentionnent que Jésus a été baptisé par Jean. Le baptême de Jean était différent du nôtre. Ce n’était pas un sacrement, même si c’était un pas en avant. C’était un signe extérieur de repentance. En traversant le Jourdain vers la terre promise, le peuple d’Israël exprimait le désir de repentance, de recommencer, d’être le peuple que Dieu voulait qu’il soit. Et Jésus, aujourd’hui, les rejoint. Il n’était pas un pécheur ; mais il s’identifie avec son peuple pécheur. Jésus descend dans l’eau. Il était déjà « descendu du ciel », comme le dit le credo : il ne s’agit pas d’un voyage spatial, mais de son incarnation. Maintenant, il descend encore plus loin : dans le flot boueux et tumultueux de l’histoire de l’humanité pécheresse. Bien plus, en mourant sur la croix il descend dans le royaume des morts. Il s’abaisse encore plus, voire à l’extrême. Et le Saint-Esprit « descend » sur lui aujourd’hui. Le Fils et l’Esprit, les deux mains du Père, descendent ensemble, jusqu’à nous, jusqu’à toucher le plus bas de notre humanité – afin que le Père puisse nous récupérer, nous ramasser, nous ramener dans ses bras.

C’est la révélation déconcertante d’un Dieu-Amour.

Et ce mouvement continue encore. Par notre baptême, Jésus descend à notre niveau. Il vit sa vie avec chacun de nous. Les Pères de l’Église aiment dire qu’aujourd’hui, le Christ a purifié, consacré l’eau et ainsi inauguré le sacrement du baptême. Nous pouvons élargir cet horizon. L’histoire humaine est l’eau. Nous menons des vies ordinaires, avec toutes nos failles et nos blessures. Pourtant, le Christ est à notre porte. Il vient. Il nous envoie l’Esprit. Il veut purifier notre vie et y déverser la foi, l’espérance et l’amour. Il donne, élargit et approfondit notre vie. Il remplit l’ordinaire de tous les jours de sens, de grâce et de prière. Après son baptême, Jésus prie, et le ciel s’ouvrit dit saint Luc. Il en est ainsi en nous. Les cieux sont ouverts. Et le Saint-Esprit descend et le Père dit : Tu es mon Fils/ma Fille, le bien-aimé(e) ; en toi je trouve ma joie. Chaque jour, le Père le dit à chacun de nous.

Chers frères et sœurs, ayons cette consolation. L’eau vitale du Christ coule déjà dans nos vies (pas de pubs). Qui sait ce qui attend chacun de nous cette année ? Mais ce dont nous pouvons être sûrs, c’est que Dieu est déjà là. Dieu est avec nous. Christ est en nous. Le Saint-Esprit repose sur nous. A Notre Seigneur la gloire pour les siècles des siècles.

Homélie du 25 Décembre

Le jour de Noel

P. Joseph G. EID

Noël, frères et sœurs, fait revivre en nous des souvenirs d’innocence, des souvenirs d’enfance, quand nous avions toutes les raisons de croire et d’espérer que la vie serait douce et que nous pourrions être gentils, à notre tour, avec tous ceux que nous voulions rencontrer.

Noël produit cet effet en nous, mais pas seulement ! À Noël, nous est offerte la grâce de redevenir des enfants, car Dieu lui-même entra dans notre monde comme un petit enfant. Et tous ceux qui accueillent cet enfant dans leur cœur reçoivent la grâce de devenir eux-mêmes un enfant de Dieu. C’est le miracle de Noël :

Dieu a choisi nos cœurs pour sa propre naissance, partageant notre humanité afin de nous diviniser. Noël nous révèle à nouveau le pouvoir de guérison, de la révérence et du respect devant tout ce qui est humain en nous et chez les autres.

Le miracle de Bethléem se produit aussi dans nos vies lorsque nous prenons sur nous l’esprit et le cœur de ceux qui étaient présents en cette nuit : Marie, Joseph, les bergers et les mages, tous ayant reçu un message personnel d’un ange, et tous chargés de le partager et de le diffuser – pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Marie, déjà émerveillée par la conception et la naissance de son enfant, s’étonne encore plus de ce que les bergers ont à raconter. Ce qu’ils ont vu et entendu. Elle chérit tranquillement le miracle de Bethléem, le prenant dans son cœur et elle le méditera, dans la joie et le chagrin, tous les jours de sa vie, et même pour toute l’éternité.

Chers frères et sœurs, en ce jour béni, je prie pour chacun de nous, pour que, devant ce mystère intarissable de l’incarnation, nous gardions cette ardeur de foi, cet élan de l’annonce, cette joie de Noël, cet acharnement à la justice, cette ouverture du cœur à la vie, et ces retentissements des cris d’actions de grâce dans notre vie. Que Noël soit, tout au long de notre vie, notre itinéraire de vie qui nous mène à incarner l’amour de Dieu au sein d’un monde pauvre dont la vraie richesse ne peut être que ce petit enfant.

Woulida al Masi7 !

Homélie du 24 décembre

Solennité de la nativité de Notre Seigneur

P. Joseph G. EID

Il y a longtemps, un grand général était sur le point d’envoyer son armée de terre faire face à un puissant ennemi, bien plus armé. Il se dirigea vers l’ennemi par voie maritime. Quand ils atteignirent la côte, les soldats descendirent et toutes les cargaisons furent déchargées. A la surprise de tous, le général ordonna de mettre le feu à tous les navires. S’adressant à ses hommes avant la bataille, il déclara : « Voyez-vous ces bateaux partir en fumée ? Cela signifie que nous ne pouvons pas laisser ces rivages en vie sans gagner ! Nous n’avons plus de choix ; nous gagnons où nous périssons. » Ils ont gagné !

La vie est une bataille que vous pouvez gagner ou perdre. Le Christ est venu dans ce monde pour gagner la bataille, au prix de sa propre mort. C’est le vrai sens de Noël, qui rejoint celui de Pâques. Notre bataille devrait être une bataille d’amour, comme celle de Jésus. Même sa nativité a été marquée par une séparation entre deux camps. Quel camp allons-nous choisir au cours de cette bataille ? Ferons-nous partie des habitants indifférents de la ville ou des bergers chaleureux de la campagne. Quels sentiments remplissent nos cœurs en cette belle soirée ? Comment allons-nous nous approcher de Toi ce soir de Noël ?

En ce soir béni, petit enfant, nous nous approchons de toi pour t’adorer. Nous sommes tous là, mendiant, pour nous et pour les autres, la guérison spirituelle, la guérison émotionnelle, la guérison mentale, la guérison physique, mendiant toute forme de guérison qui ne peut se produire que lorsque l’amour coule à flots. Et ce soir, l’amour coule à flots de cette mangeoire.

En ce soir de Noël également, ce ne sont pas uniquement les petits qui vont recevoir des cadeaux. Nous nous approchons de toi comme les rois-mages. Nous voulons, chacun à notre manière, t’offrir des présents pour t’exprimer notre amour. Nos cadeaux de Noël sont des fleurs que nous offrons aux membres de nos familles ou aux amis, des câlins, des moments partagés, peut-être de l’argent, notre expertise, ou une simple présence humaine chaleureuse.

Petit enfant, nous avons tous quelque chose de précieux à te donner. Nous sommes de ton camp. C’est le vrai bonheur de Noël. C’est notre vrai bonheur. C’est la guerre de l’amour que nous nous engageons à gagner. Oui petit Jésus, ce soir nous avons choisi notre camp. Nous sommes tes guerriers. Et nous nous engageons à brûler les navires de sécurité, les navires de haine, les navires de jalousie et d’indifférence. Alors, nous pourrons gagner cette guerre ; nous n’avons pas d’autre choix que de gagner cette guerre ; car il en va de notre humanité.

En ce soir de Noël et d’espérance, nous venons vers Toi ; nous avons confiance en Toi et nous croyons que tout est possible ce soir, car Tu es avec Nous !

Woulida al Masi7 !

Homélie de la Révélation à Joseph

P. Joseph G. EID

Évangile du jour

Mt 1 : 18-25

Chers frères et sœurs, les lectures d’aujourd’hui nous invitent à méditer le mystère du Christ. Paul, dans son épître aux éphésiens, laisse entendre que ce mystère…révélé aux Apôtres et aux prophètes, dans l’Esprit… c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile.

Dans le texte que nous venons d’entendre de l’évangile de Matthieu, nous contemplons le mystère du Christ à travers l’expérience qu’en fait Joseph, alors que dans l’évangile de Luc, c’est à travers l’expérience de Marie. Quoi qu’il en soit, Matthieu veut que nous nous concentrions sur le Christ-bébé qui va venir. Le texte insiste sur la naissance virginale de Jésus : …l’enfant qui est engendré en Marie vient de l’Esprit Saint. Elle est enceinte, et le pauvre Joseph n’a rien à voir là-dedans. Il en est juste informé par l’ange qui lui révèle ce qu’il a à faire. Cet enfant est le Fils de Dieu. Joseph lui donnera son Nom, Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. C’est la mission de Jésus annoncée par l’ange à Joseph.

En même temps, c’est à Joseph de coopérer avec Dieu en nommant l’enfant, en lui conférant cette mission. La personnalité de Joseph est aussi mise en évidence dans ce texte : il est un homme juste ; et ses réponses à l’ange sont en concordance avec celles de Marie. Elles indiquent qu’il est comme Marie, une personne de vertus, humble, une personne de foi. Comme elle, il veut servir le Seigneur. Comme elle, il est prêt à s’aventurer, même dans l’inconnu, car il a confiance. Cette confiance l’incite à obéir : Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse. Joseph protecteur de Marie et de l’enfant Jésus a été, à travers les âges, déclaré gardien de l’église universelle.

Chers frères et sœurs, nous qui sommes en Avent, en attente, nous qui attendons comme des parents impatiemment la naissance de leur enfant, et qui préparent la venue de ce nouvel être qui va changer leur vie, avec beaucoup d’enthousiasme, nous avons en Joseph un modèle de foi. Un homme qui accueille la vie avec beaucoup d’humilité et reconnaît que cette vie ne vient pas de lui. Mais il en est responsable. Sa responsabilité, il la reçoit de Dieu en qui il a confiance. Ayons, comme Joseph, ces mêmes dispositions. Mettons-nous au service du projet de Dieu qui veut nous sauver, qui veut sauver le monde en son Fils. A Notre Seigneur la gloire pour les siècles des siècles. Amen !