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Premier Vendredi du Carême 2019

Pourquoi la Croix ? La Croix est, aujourd’hui le même scandale, la même folie. Ce scandale nous mène à nous interroger sur notre espérance. L’espérance que nous possédons, nous devons pouvoir en parler et en rendre compte, avec des mots jaillis de l’intérieur, comme nous l’indique St Pierre dans sa première lettre. Rendre compte de notre espérance c’est donc la mission que nous lègue Jésus à travers son Eglise. Car la Croix que nous portons sur nous, la Croix que nous traçons sur nous fréquemment dans la journée, cette Croix nous enseigne.

La croix est nécessaire : La Croix est là, imbibée de souffrance et d’anxiété. Inutile de penser que Jésus aurait pu mourir autrement, plus tard ou ne pas mourir du tout et rester avec nous. Non, Jésus le dit à plusieurs reprises à ses disciples : « Il fallait que le Fils de l’homme monte à Jérusalem » … Cet « il fallait que » a un sens. Par sa passion Jésus nous révèle le plan d’amour de Dieu. Cet « il fallait que » n’est pas une fatalité, une prédestination (Maktoub). Et comme saint Pierre, nous avons envie de dire : « Nous ne permettrons pas que cela arrive. » Saint Pierre, lui était prêt à lutter et sortit son glaive.

La Croix comme instrument de salut : Dans ce drame de la mort du Christ, il semble que ce soit le mal qui triomphe. Pourtant non, il n’y a pas de fatalité. Lorsque le mal semble l’emporter, lorsque Jésus rend son âme et que tous les disciples se dispersent comme un troupeau privé de pasteur, Jésus demeure le Vivant. Il traverse les ténèbres et prive le royaume de la mort de sa puissance.  Face à tout découragement, à toute désespérance humaine, il faut opposer cette certitude, ce roc absolu de la Croix du Christ, car c’est une Croix qui ne représente pas la mort, le néant ou l’absurde, mais qui symbolise un amour infini auquel nous sommes invités à communier. En cela réside cette espérance dont nous devons rendre compte.

Sans Croix, pas d’amour : Il y a plus encore. « Quand j’aurai été élevé de terre, dit Jésus, j’attirerai tous les hommes à moi » Les bras étendus du Christ ne manifestent pas tant la souffrance humaine que l’amour de Dieu qui s’offre, qui se donne constamment, qui sort de lui-même et va jusqu’au plus bas, jusqu’au plus profond de notre misère pour nous attirer à Lui, nous élever à Lui et nous unir à Lui. Il y a ainsi rencontre entre la Croix-amour de Dieu et la Croix-réponse et amour de l’homme. C’est pour cela que l’homme a été créé, pour vivre de l’amour éternel, pour atteindre et communier pour toujours, indiciblement, à la vie divine.

Aujourd’hui, nous sommes les instruments, les échos de la Croix du Christ. Si nous sommes ainsi en marche, le regard levé vers la Croix du Christ, Dieu nous révèle à chacun et à tous ensemble notre chemin, qui est un chemin de vie, de témoignage et d’espérance, un chemin d’Église.

Méditation du dernier Vendredi du Chemin de Croix

La séduction de la croix

P. Joseph G. EID

Chers frères et sœurs, cette belle dévotion du chemin de croix que nous avons entamé dès la première semaine du carême a un attrait particulier pour les catholiques et pour les orthodoxes. Paradoxe frappant que l’image d’un homme torturé devienne signe de beauté et de consolation. Les Mormons par exemple, les Musulmans ou les Témoins de Jéhovah trouvent cette image offensante, et pourtant, nous qui professons la foi en Christ crucifié, mort et ressuscité, nous trouvons cette image attirante, séduisante, tout à fait consolante.

Un homme torturé à mort : meurtri, horriblement maltraité. C’est-ce que nous accrochons fièrement sur les murs des maisons, dans les salles de classe (en tout cas au Liban), autour du cou ; et nous vénérons le crucifix/la croix dans nos églises ; et nous apprenons à nos enfants d’embrasser la croix avec révérence, de faire le signe de la croix à des moments précis ou avant chaque défi, etc. Cela en soi est un miracle. Prenez le temps d’y réfléchir. N’est-ce pas là un des nombreux moyens par lesquels la prophétie de Notre-Seigneur s’accomplit sous nos yeux chaque jour : Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes.

Quelqu’un peut-il m’expliquer ce phénomène ? Il est relativement facile d’apprécier l’attrait que nous avons pour l’image de la Vierge à l’Enfant, ou de celle de Jésus avec les enfants, ou de celle de Jésus ressuscité en gloire nous invitant à venir à lui ; mais qui peut être attiré par un homme étendu dans l’agonie, couvert de sang et de sueur, haletant, à peine capable de parler ? Et pourtant nous le sommes. Comment l’expliquer ?

Dans son Éthique de Nicomaque, Aristote dit : « …toute action et tout choix tendent vers quelque bien, à ce qu’il semble. Aussi a-t-on déclaré avec raison que le Bien est ce à quoi toutes choses tendent ». Nous tendons vers le bien. La bonté est attrayante, et le Seigneur crucifié est la révélation suprême de la bonté de Dieu.

C’est parce qu’à un niveau encore plus profond, ce qui est bon l’est précisément parce qu’il se déverse sur ceux qui l’approchent. Comme l’ont enseigné les platoniciens, avant et avec Aristote : « C’est la nature du bien de se répandre ». Le bien est attrayant parce que le bien est un don, un bienfait gratuit, qui se répand et ne demande rien en retour. Ainsi, le crucifix est l’image de la bonté, ou le don de Dieu se répandant sur tous les hommes et toutes les choses. Cela nous attire parce que la croix est la révélation suprême de tout le bien que Dieu nous réserve.

Et ce don est si parfait parce qu’il est la réponse ultime au mal, et à nos péchés. En réponse à nos manquements, face à nos échecs dans le domaine de l’amour, là où nous agissons contre l’amour, et que notre humanité est tellement défigurée et bafouée, Jésus se donne dans le fait même de souffrir sa « passion », à cause du mal que nous avons répandu sur lui : tous nos péchés, graves et légers, toutes nos faiblesses, toutes nos trahisons et ingratitudes, toutes nos tromperies et nos duretés à l’égard des autres, etc. Le crucifix ne nous parle pas de notre bonté, mais de nos défauts tragiques, il est la réponse extraordinaire de notre Dieu de bonté. Et ce qui est extrêmement extraordinaire, c’est que la croix nous révèle également notre potentiel. On est capable de tellement d’amour. De la croix résonne ainsi notre appel, notre vocation à aller boire à la source de la bonté et de l’amour même qui jaillit du cœur transpercé de Jésus. En même temps, ce même crucifix exprime sa soif d’amour.

Dieu aspire à notre amour, il attend le jour de notre repentance, il utilise toutes les preuves de son amour ; se soumettant même à notre indifférence et à notre ingratitude, tant qu’il y a un espoir de l’aimer.

Ses bras sont tendus en attendant notre retour ! Alors que nous nous préparons à célébrer les grands mystères de notre salut, la passion et la pâques de notre Seigneur, fixons nos cœurs et nos regards affectueux sur le crucifix et laissons la bonté du Sauveur se répandre sur nous. Chers amis, ce Dieu crucifié qui nous propose le salut, veut également que nous le sauvions. Le Fils de Dieu souffrant héroïquement sur sa croix est quelqu’un qui désire sincèrement que nous le sauvions des liens de la solitude, de la négligence, du rejet, de l’abus et du chagrin. « Mon âme est triste jusqu’à la mort ; restez ici, et veillez avec moi. » Je vous prie de vous encourager mutuellement à rester avec le Seigneur, à veiller avec lui. Ne le négligeons pas. Il frappe à nos portes. Les apôtres n’étaient pas à la hauteur de la tâche la veille de sa crucifixion, mais ils le furent plus tard quand ils furent remplis du Saint-Esprit, de l’amour divin. Ils devinrent alors les prédicateurs du Christ crucifié, jusqu’aux extrémités de la terre.

Soyons, chers amis, les messagers de l’amour de Dieu.

Méditation Vendredi Chemin de Croix

Pourquoi Jésus a t’il souffert ?

P. Béchara AOUN

Frères et sœurs, dans ma dernière méditation j’ai abordé la question suivante : comment Jésus-Christ a-t-il réagi face à la souffrance causée par autrui?

Souvenez-vous, Jésus-Christ n’a pas fait comme si de rien n’était (même pas mal). Il n’a pas non plus rendu le mal par le mal. Ainsi il a laissé une porte ouverte à la réconciliation.

Ce soir, la question à laquelle je vais essayer de répondre est « pourquoi ». Pourquoi a -t-on crucifié un homme bien appelé Jésus? C’est absurde non? Dans le credo nous répétons que le fils a été crucifié pour nous sous Ponce Pilate… C’est bel et bien une vérité historique, bien que difficile à comprendre.

Nous pouvons trouver pourtant quelques éléments de réponse dans la Bible. Certains parlent de l’accomplissement des écritures en se référant à Isaïe 53 le serviteur souffrant. D’autres évoquent le complot politique, Jésus commence à prendre beaucoup trop de place, chose qui dérange, jalousie, orgueil, mensonge, trahison. Et si nous posons cette question à nos enfants, ils répondent : Jésus est mort sur la croix parce qu’il nous aime.

Frères et soeurs, en acceptant sa mort sur la croix Jésus-Christ a voulu:

1- Sauver l’humanité entière, et non uniquement son peuple.

Contrairement au kamikaz ou au djihadiste ou au fida2i qui en se tuant tue le maximum d’ennemis pour permettre aux siens de gagner.

2- Nous montrer à quel point le mal incarné par des péchés est absurde

Le Christ, en faisant le bien, n’avait pas pour objectif de prendre la place du grand prêtre ni de chasser l’occupant romain, et pourtant on l’a tué.

3- Prouver qu’aimer c’est tout donner et se donner soi-même.

Merci Seigneur pour la grandeur de ton amour. Guide mes pas pour discerner à quel point le péché est capable de détruire. Amen

Méditation Vendredi Chemin de Croix

Marie au pied de la croix

P. Joseph G. EID

Après avoir parlé la semaine dernière de la figure du disciple bien-aimé, je vais m’arrêter aujourd’hui sur la figure de Marie au pied de la croix, à partir du passage de l’évangile de Saint Jean (Jn 19, 25-27). Et pour ce, je vais parler de Marie à partir de trois axes : Marie comme témoin qui se tient au pied de la croix, Marie comme mère appelée à regarder son nouveau fils/le disciple bien-aimé, et le disciple appelé à prendre Marie chez lui.

Je commence par lire le texte

Or, près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie Madeleine. Jésus, voyant sa mère, et près d’elle (se tenant près d’elle) le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui

En nous plaçant dans la scène, nous pouvons voir Jésus, trois femmes, et le disciple bien-aimé. Ils sont au total cinq personnes. Ils sont unis par l’amour qu’ils ont pour celui qui est sur la croix. L’amour les a convoqués en cette heure douloureuse pour être présents au coté de celui qu’ils aiment, de Jésus ; tout comme nous aimerions aussi être présents près du lit de mort d’un être aimé. Seuls ceux qui aiment une personne qui souffre ont le courage d’être à ses côtés. La souffrance n’est pas quelque chose qui nous attire. Mais être présent surtout aux derniers moments de la vie d’une personne est signe d’un amour mature.

I. Marie se tenant au pied de la croix

Face à la souffrance, il est difficile de rester ferme, c’est-à-dire de « se tenir debout », surtout pour une mère qui regarde mourir son fils. Dans le texte original, le verbe histemi (grec), signifie « redresser », « se tenir debout ». Que veut dire être debout dans la tradition biblique ?La première fois qu’apparaît ce mot dans ce passage est quand l’évangéliste raconte que Marie, les autres femmes et le disciple bien-aimé « se tenaient debout (fermes) » au près de la croix. Le mot « croix », staurós en grec, a ses racines dans le verbe histemi. Enfin, le mot apparaît quand le disciple bien-aimé est décrit comme « se tenant près de la mère ». Je reviens vers la question : Que veut dire être debout, se tenir debout dans la tradition biblique ?

a. Se tenir debout est la position du témoin. Le mot pour témoin en grec est martys, le martyr, celui qui témoigne. Un témoin est prêt à témoigner quelles que soient les conséquences, même s’il doit donner sa propre vie. Jésus, se tenant debout sur la croix, est le témoin de l’amour du Père pour lui et pour l’humanité. Et le Fils témoigne en donnant volontairement sa propre vie sur la croix.

b. Nous ne pouvons pas oublier que Marie n’est pas seulement une mère, elle est juive. En tant que mère juive, elle sait que son rôle n’est pas seulement d’être une mère aimante pour ses enfants, mais aussi d’être leur enseignante. L’évangéliste place le disciple debout près de la mère. Son témoignage accompagne le témoignage de Marie. Mais Marie, avant d’être désignée comme mère du disciple et enseignante, est aussi un disciple qui suit son Fils au pied de la croix. Elle donne à ses fils et à ses filles spirituels l’exemple d’un témoin ferme (tenant debout) qui suit les traces du Maître.

c. Être debout est aussi la posture de prière dans la culture et le temps de Jésus. Jésus enseigne à ses disciples à être en prière constante. Marie, les autres femmes et le disciple bien-aimé font ce que leur Maître enseigne. Jésus lui-même prie. Comme nous le savons déjà, quand Jésus dit sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? (Ps. 22), il est en train de prier.Les prières sont importantes surtout quand nous sommes au chevet d’un être cher en train de souffrir et que nous ne pouvons rien faire pour arrêter les souffrances. Jésus, Marie, les autres femmes et le disciple bien-aimé prient et offrent leur souffrance à Dieu.

d. Rester/tenir debout est aussi la posture de l’écoute de l’Évangile. Dans la liturgie, nous nous levons pour écouter l’évangile. Quand nous écoutons l’Évangile, nous sommes témoins dans le monde de ce que nous avons entendu être proclamé. Nous affirmons que ce que nous entendons est vrai, et nous sommes prêts à donner notre vie pour cette vérité. Les personnages présents, debout près de la croix, représentent l’amour que nous avons pour notre Seigneur Jésus-Christ.e. Etre debout c’est également préfigurer la résurrection du Christ.


II. Femme, voici ton fils (regarde ton fils)

Je pense qu’il est également important de s’arrêter sur le regard dans ce passage.

a) Jésus voit sa mère et le disciple.

b) Jésus demande à sa mère de voir le disciple/fils.

c) Jésus demande au disciple/fils de voir sa mère.

En les regardant lui-même, Jésus pénètre dans leurs cœurs profondément. Jésus sait ce qu’il y a à l’intérieur de Marie et du disciple bien-aimé. Il les connaît bien. Il a toujours su qu’ils seraient là avec Lui, et maintenant, par la croix, ils sont en réalité avec Lui. En portant la souffrance à ses côtés, en buvant à la même coupe, ils sont maintenant prêts à être appelés à une nouvelle mission.Quand Jésus dit à Marie « regarde ton fils » et au disciple « regarde ta mère », il les appelle à se mettre face à face et à se contempler. Sa mère est un don de Jésus au disciple, mais aussi le disciple est un don qui vient du cœur de Jésus à sa mère. La nouvelle mission est d’établir une nouvelle relation entre mère et disciple.Un autre mot grec sur lequel je veux me concentrer est le verbe lego qui signifie « dire », « parler », « commander ». Le verbe apparaît deux fois dans le texte :

a) Jésus  » dit  » à sa mère,b) alors Il « dit » à Son disciple.Dans le récit de création quand Dieu  » dit « , on a un acte de création. Quand Dieu crée le Monde, « Dieu dit : Que la lumière soit, et la lumière fut (Gn 1: 3). Et devant tout ce qu’il crée, Dieu dit que c’est bon, à l’exception de l’être humain, où il dit que c’est très bon.

Ainsi, quand Jésus regarde le disciple et lui dit « voici ta mère » et inversement, Marie devient la vraie mère du disciple, et le disciple devient son vrai fils. Une nouvelle famille vient à exister, selon ce que Jésus dit. Et cela doit être bon, selon ce que nous avons observé à propos du discours de Dieu dans le récit de la création

III. Le disciple prend Marie chez lui

Le disciple bien-aimé, écoutant ce que Jésus lui demande, prend Marie comme une nouvelle mère, comme sa propre mère. Il la prend dans son intimité et lui donne une place chez lui.
Conclusion

1) Connaître Marie, c’est la suivre/marcher avec elle à la suite de son Fils.

2) Debout devant Marie au pied de la croix, nous devenons fils et filles de Marie.

3) Un fils et une fille de Marie témoignent de la croix et de la résurrection de Jésus.

4) Au pied de la Croix, Jésus demande à sa mère et à son disciple de se contempler, en d’autres termes, de pénétrer le cœur de l’autre et de vivre dans une relation intime les uns avec les autres.

5) Après une profonde contemplation, le disciple emmène avec empressement la mère de Jésus chez lui.

Méditation Vendredi Chemin de Croix

Le disciple bien aimé

P. Joseph G. EID

Aujourd’hui, je vais parler un peu du disciple bien-aimé, le disciple qui a été présent lors de la crucifixion. Que pouvons-nous apprendre du disciple bien-aimé? Plusieurs hypothèses ont été soulevées à propos de l’identité de ce disciple. La plus connue est celle qui associe ce disciple à l’apôtre Jean, fils de Zébédée et le frère de Jacques. Mais le but de ce que je vais dire n’est pas de soumettre une autre hypothèse sur l’identité du disciple bien aimé.

Je commence par dire qu’il n’est mention de ce disciple que dans l’évangile de Jean. Et même dans l’évangile, il est mentionné peu de fois. Il y a également mention d’un disciple anonyme, non-nommé et de l’autre disciple. Beaucoup de théologiens pensent qu’il s’agit du même personnage. Je vais essayer de suivre un peu ce disciple dans l’évangile de Jean, pour essayer d’en tirer une nourriture spirituelle pour nous aider à progresser en ce temps de Carême.

a. Aller à la rencontre du Christ

Dans le premier chapitre de l’Évangile, nous apprenons que Jean le Baptiste avait des disciples, et deux de ses disciples suivirent Jésus. Nous apprenons un de leurs prénoms. André, le frère de Simon Pierre » (Jean 1 :40). Mais l’autre disciple reste anonyme. Une des choses que l’on peut apprendre à partir de cet évènement c’est qu’en tant que disciple, il faut apprendre à écouter, il faut être à l’écoute des témoignages des autres (les deux disciples ont quitté leur maître, Jean-Baptiste suite à son témoignage). Notre écoute doit nous pousser à aller à la rencontre du Christ même si cela va nous obliger à quitter notre lieu de confort, nos habitudes. C’est-ce que fit ce disciple. Des fois, il ne suffit pas de suivre le Christ sans points de repères. Comme lui, nous sommes invités à chercher vraiment la demeure du Christ, et à demeurer avec lui. Le Christ nous invite dans sa demeure comme il l’a fait avec le disciple bien-aimé. Sa demeure pour nous chrétien, c’est son église. Il est là dans l’eucharistie, il est là comme le criait le Saint Curé d’Ars.

D’où le point suivant :

b. Accepter d’être présent au dernier repas, à l’eucharistie

Durant le dernier repas de Jésus avec ses disciples et après l’épisode du lavement des pieds et l’annonce de Jésus que l’un de ses disciples le trahira, on a la première mention explicite du disciple bien aimé au verset 23 : Il y avait à table, appuyé contre Jésus, l’un de ses disciples, celui que Jésus aimait. Comme les disciples de Jésus, on est appelé à recevoir la miséricorde de Dieu, de ce fait accepter de se faire laver par le Christ. Chercher à être pur, d’ou l’importance du sacrement de la réconciliation, tout particulièrement en ce temps de Carême, où l’on reçoit en abondance la miséricorde divine.

c. Garder de bons liens amicaux avec les autres

Après l’arrestation de Jésus, l’évangile mentionne l’autre disciple présent dans la cours du grand prêtre. C’est lui qui intercéda pour Pierre afin de le laisser entrer à l’intérieur de la cour. Il était évidemment important – car il était personnellement connu du grand prêtre, et c’est ce fait qui permit à Pierre d’accéder à la cour.Cet évènement nous apprend à demander à Dieu la grâce de la patience et de garder le sang froid, même durant les persécutions. Je dois essayer de rester proche, même de ceux qui ne partagent pas mes pensées. C’est grâce aux liens de l’autre disciple que Pierre a pu accéder à la cour.

d. Suivre le Christ même au pied de la croix.

Le disciple bien-aimé apparaît également au pied de la Croix :Quand Jésus vit sa mère et le disciple qu’il aimait, il dit à sa mère: «Femme, voici ton fils! Puis il dit au disciple : « Voici ta mère !» Et dès cette heure le disciple la prit chez lui (Jean 19). Ici nous avons une autre indication de l’importance du disciple bien-aimé : Jésus lui confie le soin de sa mère. Et le disciple est à la hauteur de la mission que Jésus lui donne, commençant à prendre soin de Marie « dès cette heure ». Comme le disciple, nous sommes invités à ne pas choisir les issues faciles, et à accepter le cadeau de Jésus, sa maman Marie. Prenons soin de Marie, et accueillons là dans la demeure de notre cœur dès cette heure.

e. Suivre le Christ au tombeau

Le disciple bien-aimé est également mentionné quand Marie-Madeleine court dire aux disciples que la tombe de Jésus est vide : Le texte nous dit qu’elle court trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. Puis le texte continue : Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau. Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas. Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part, à sa place. C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut.Ce que l’on peut déjà faire remarquer, c’est qu’à l’exception de la crucifixion, le disciple bien-aimé et Pierre sont toujours mentionnés ensemble.L’épisode du tombeau nous révèle que le disciple bien-aimé se reporte aussi à Pierre, lui permettant d’entrer dans la tombe d’abord, et il est prompt à croire, suite au témoignage de Pierre. Pierre est la Pierre sur laquelle est bâtie l’église. Cet épisode nous enseigne que même si notre quête nous mène à un tombeau vide, ayons confiance en l’église, attendons que Pierre arrive. Le pape a son mot à dire dans notre vie de foi. Intéressons-nous à l’enseignement de l’église. C’est après l’entrée de Pierre au tombeau, que le disciple bien-aimé vit et crut. Aimer le Christ ne suffit pas, si cet amour n’ouvre pas mon cœur à la grâce de l’Esprit qui œuvre en son église.

f. Garder une part du mystère

Il y a une dernière mention du disciple bien-aimé à la fin de l’évangile. Là on voit sept personnages présents en train de pécher : Simon Pierre, Thomas, Nathanaël, les fils de Zébédée, et deux autres (Jean 21 : 2). Les disciples passent toute la nuit à pêcher et, le matin, Jésus apparaît sur le rivage, mais ils ne le reconnaissent pas. Jésus leur demande alors s’ils ont attrapé quelque chose. Et il leur dit de jeter le filet du côté droit du bateau, et ce fut la surprise. Le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : C’est le Seigneur ! Puis on a l’épisode où Jésus demande à Pierre à trois reprises : Pierre m’aimes-tu ? et tout de suite après on a Pierre qui regarde le disciple bien-aimé et qui demande à Jésus : « Seigneur, qu’en est-il de cet homme ? »Et Jésus qui répond : « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi. » Nous apprenons ici que le disciple bien-aimé a continué à être bien connu par la communauté chrétienne par la suite, à cause de la rumeur qui a été suscitée par la mauvaise interprétation des paroles de Jésus, car on avait cru que ce disciple n’allait pas mourir.

Puis on a vers la fin de l’évangile l’identité de l’auteur dévoilée au verset 24, sans qu’elle ne soit réellement dévoilée : C’est ce disciple qui témoigne de ces choses et qui les a écrites, et nous savons que son témoignage est vrai.

Personnellement, je préfère l’hypothèse selon laquelle l’identité de ce disciple reste non connue. Ainsi, chacun de nous peut s’identifier à ce disciple qui cherche à suivre le Christ fidèlement. L’évangile nous révèle des traits de caractères de ce personnage emblématique, tout en gardant un peut le coté énigmatique de ce personnage.

Peut-être que cela devrait nous dire quelque chose de sa personnalité. D’une part, c’est une attitude d’humilité que de ne pas chercher à être connu, à être aux premiers rangs, tout le temps exposé à la lumière.

D’autre part, c’est une attitude qui dit quelque chose de la grandeur de l’être humain qui reste un mystère inépuisable, surtout quand il est bien-aimé du Seigneur.