Premier Vendredi du Carême 2019

Pourquoi la Croix ? La Croix est, aujourd’hui le même scandale, la même folie. Ce scandale nous mène à nous interroger sur notre espérance. L’espérance que nous possédons, nous devons pouvoir en parler et en rendre compte, avec des mots jaillis de l’intérieur, comme nous l’indique St Pierre dans sa première lettre. Rendre compte de notre espérance c’est donc la mission que nous lègue Jésus à travers son Eglise. Car la Croix que nous portons sur nous, la Croix que nous traçons sur nous fréquemment dans la journée, cette Croix nous enseigne.

La croix est nécessaire : La Croix est là, imbibée de souffrance et d’anxiété. Inutile de penser que Jésus aurait pu mourir autrement, plus tard ou ne pas mourir du tout et rester avec nous. Non, Jésus le dit à plusieurs reprises à ses disciples : « Il fallait que le Fils de l’homme monte à Jérusalem » … Cet « il fallait que » a un sens. Par sa passion Jésus nous révèle le plan d’amour de Dieu. Cet « il fallait que » n’est pas une fatalité, une prédestination (Maktoub). Et comme saint Pierre, nous avons envie de dire : « Nous ne permettrons pas que cela arrive. » Saint Pierre, lui était prêt à lutter et sortit son glaive.

La Croix comme instrument de salut : Dans ce drame de la mort du Christ, il semble que ce soit le mal qui triomphe. Pourtant non, il n’y a pas de fatalité. Lorsque le mal semble l’emporter, lorsque Jésus rend son âme et que tous les disciples se dispersent comme un troupeau privé de pasteur, Jésus demeure le Vivant. Il traverse les ténèbres et prive le royaume de la mort de sa puissance.  Face à tout découragement, à toute désespérance humaine, il faut opposer cette certitude, ce roc absolu de la Croix du Christ, car c’est une Croix qui ne représente pas la mort, le néant ou l’absurde, mais qui symbolise un amour infini auquel nous sommes invités à communier. En cela réside cette espérance dont nous devons rendre compte.

Sans Croix, pas d’amour : Il y a plus encore. « Quand j’aurai été élevé de terre, dit Jésus, j’attirerai tous les hommes à moi » Les bras étendus du Christ ne manifestent pas tant la souffrance humaine que l’amour de Dieu qui s’offre, qui se donne constamment, qui sort de lui-même et va jusqu’au plus bas, jusqu’au plus profond de notre misère pour nous attirer à Lui, nous élever à Lui et nous unir à Lui. Il y a ainsi rencontre entre la Croix-amour de Dieu et la Croix-réponse et amour de l’homme. C’est pour cela que l’homme a été créé, pour vivre de l’amour éternel, pour atteindre et communier pour toujours, indiciblement, à la vie divine.

Aujourd’hui, nous sommes les instruments, les échos de la Croix du Christ. Si nous sommes ainsi en marche, le regard levé vers la Croix du Christ, Dieu nous révèle à chacun et à tous ensemble notre chemin, qui est un chemin de vie, de témoignage et d’espérance, un chemin d’Église.

La Semaine Sainte

Débute déjà une des semaines les plus importantes de l’année liturgique, la semaine qui nous prépare à vivre intensément le mystère chrétien de la Mort et la Résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ : la Semaine Sainte.

Le Carême fut pour nous le temps propice pour réfléchir et méditer d’avantage nos vies afin que nous puissions nous renouveler et de nous préparer à vivre le mystère de notre salut. Maintenant, nous nous approchons de la Semaine Sainte et du dimanche de Pâques. Nous allons ironiquement célébrer la mort et de la Résurrection de Notre Seigneur.

La Semaine Sainte, dans notre Eglise maronite, est considérée comme une saison liturgique indépendante à l’intérieur du temps du Carême. Elle commence par « Naheero » ou « l’arrivée au Port (Mina) » le soir du dimanche des Rameaux et se termine le dimanche de Pâques. Durant la célébration du dimanche des Rameaux, nous nous rappelons quand la foule a acclamé Jésus comme roi. Des juifs de tout âge l’ont accueilli à Jérusalem. Ils ont proclamé « Hosanna au Fils de David, béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ; Hosanna au plus haut des cieux. »

« L’arrivée au port » est un ancien rite de l’Eglise maronite. Il nous rappelle que Jésus est le Port du Salut. Le navire qui est l’Eglise, est souvent comparé à Marie, Nouveau navire de la vie, qui va nous porter en toute sécurité pour nous aider à atteindre le port après le voyage périlleux du Carême. Cette célébration ouvre la Semaine Sainte. Célébrée en dehors de l’Eglise, elle se termine à l’intérieur après une procession de bougies symbolisant le Christ – Vraie Lumière.

Les prières du lundi, mardi et mercredi de la Semaine de la Passion sont appelées « Sotooro » ou prière du soir de carême. Nous avons une prière spéciale pour chaque jour avec un cycle de lectures de l’Ancien et du Nouveau Testament annonçant la mort du Christ comme accomplissement et réalisation de toutes les prophéties. Jésus est le Fils de Dieu livré aux mains de l’homme, mis à mort, qui a souffert et a été humilié pour notre salut.

Le Mercredi de la Semaine de la Passion est aussi appelé mercredi d’Ayoub (Job). Job a beaucoup souffert, et a perdu santé et richesse, fils et filles, mais jamais il ne maudit Dieu. Il était connu pour sa patience. Il représente le Christ recevant volontiers souffrance et mort, et se remettant entre les mains de son Père. Ce jour-là, le rite de la lampe est célébré. Ancien rite de l’Eglise maronite, on y prépare une pâte avec sept mèches (bougies) insérées dedans, représentant sept lampes en lien avec les visions du prophète Jérémie et de l’apôtre Jean dans son Apocalypse. Autre interprétation, la pâte représenterait le corps meurtri de Job (Ayoub) et les bougies représenteraient les sept dons de l’Esprit Saint. Au cours de cette célébration, l’huile est bénie et tous les fidèles reçoivent l’onction.

Le Jeudi Saint ou jeudi des Saints Mystères commémore la dernière Cène, Jésus lave les pieds de ses disciples. En ce jour, Jésus a fondé les sacrements, en particulier le sacrement de l’Eucharistie et du Sacerdoce. C’est le jeudi des prêtres par excellence. La coutume était de visiter sept églises, symbolisant les sept sacrements, en méditant dans chaque Église sur l’un des Sacrements. Cette coutume a commencé d’abord à Rome, où les chrétiens sont allés visiter sept églises sur sept collines de Rome, pour honorer les tombes des premiers martyrs chrétiens et disciples, en particulier les tombeaux de Pierre et Paul. Cette coutume existe encore dans nos paroisses au Liban. On visite le Saint-Sacrement exposé habituellement après la cérémonie du lavement des pieds. En ce jeudi saint, le prêtre, agissant in persona Christi, ce qui signifie en la personne du Christ, lave les pieds de douze de ses paroissiens montrant le mystère de l’amour et de la compassion du Christ, répétant ainsi l’acte d’humilité ultime réservé aux esclaves chargés de la tâche de laver les pieds de leur maître. Cet acte d’humilité accomplit les prophéties sur le serviteur souffrant, dont parle le prophète Isaïe.

Le Vendredi saint est un des plus grands jours de l’année. En ce jour, Jésus a été crucifié et mis à mort. Il a payé le prix ultime de notre salut : sa vie. Il est le Fils unique, l’héritier. En lui, par lui et grâce à lui nous sommes devenus fils et enfants de Notre Père, cohéritiers du royaume céleste et de la vie éternelle. La mort pleine de vie de notre Seigneur nous procure le salut pour nos âmes et la vie éternelle. Jésus nous a libérés des entraves de péchés. Il a porté nos infirmités et a enduré nos souffrances.

Le Vendredi, deux cérémonies sont célébrées. La première célébration est la « signature du Calice » appelée aussi « la liturgie de la messe présanctifiée ». Il s’agit d’une messe sans les paroles de l’institution (consécration), qui sont au centre de chaque célébration eucharistique. Le Vendredi Saint Christ lui-même est le sacrifice, l’ultime et l’oblation parfaite. Lors de la cérémonie, le prêtre invoque l’Esprit Saint pour descendre sur le calice placé sur l’autel. Les fidèles communient aux hosties consacrées durant la veille de la liturgie du Jeudi Saint.

Le moment le plus important de cette liturgie est la procession du Saint-Sacrement placé sur la tête du prêtre lui rappelant le jour de son ordination. La deuxième cérémonie est l’Adoration de la Croix célébrée en mémoire de la mort de Jésus-Christ crucifié sur le « bois de la honte ». Jésus a été crucifié entre deux criminels. Tandis que le prêtre est en train de lire l’Evangile de Luc sur la crucifixion de Jésus, le diacre ou le serveur va allumer la bougie placée à droite de la croix pour symboliser la délivrance du criminel de droite. Beaucoup de chrétiens pendant ce jour-là apportent des fleurs pour honorer la Sainte-Croix. Toutes les fleurs sont mises dans le tombeau. Après la cérémonie, la croix est enterrée jusqu’au dimanche de Pâques.

Le Samedi de la Lumière est le dernier jour de cette Semaine Sainte, et le dernier jour du Carême. Il commémore le jour où le Seigneur avait choisi pour visiter les morts. Ce jour est un jour non-liturgique. Cependant, une belle cérémonie sera célébrée au cours de cette journée : « la prière du pardon ». C’est une ancienne prière de l’Eglise maronite et toutes les Églises syriaques qui célèbrent le pardon reçu grâce à la mort de Jésus-Christ. Le Samedi de la Lumière est le jour du pardon par excellence.

Tous les chrétiens sont invités à confesser leurs péchés au cours de cette cérémonie et à implorer le pardon. Les Confessions sont entendues individuellement, et l’absolution est donnée à tous ceux qui ont avoué leurs péchés. Pâques est célébrée à minuit, la première heure de la journée. La cérémonie de Pâques est le rite de la paix. Jésus Christ est le Roi de la Paix. Par sa mort et sa résurrection, il a apporté la paix à la terre.

Le rite de la paix est célébré à minuit Liturgie et / ou Pâques dimanche matin au cours de la Divine Liturgie, quand le prêtre bénit l’assemblée avec la Croix. Le dimanche de Pâques est le jour de la paix.